you know my name (nf&nr, flashback)

Les branches craquent sous tes pas, brisent le silence pesant de la forêt. D’une main, tu traînes un lapin. Et ton dos, lui, soutient un large sac à dos. T’es équipé pour l’occasion. La vie, ici, était presque idéale. Si tu en oubliais la situation mondiale actuelle. Si t’avais eu l’idée d’une idylle de retraite, tu l’aurais certainement passée ici. Mais t’es plutôt le genre de type à mourir au combat. T’es pas ici pour prendre des vacances, bien au contraire. Si ton entourage pourrait croire à ta mort, disparu depuis une bonne petite année, tu ne fais que te préparer aux pires batailles que le destin vous réserve. Te retirer a été la meilleure décision à prendre, et un jour, tu vas revenir. Tu n’as pas gardé de contacts avec l’extérieur plus que nécessaire. Une unique personne pouvait se vanter de savoir où Nick Fury se terre. Ou se terrait. En effet, tu ne restes jamais au même endroit pendant longtemps. Tu as un chemin tout tracé, que tu appliques à la lettre. Enfin, presque. T’es peut-être un peu paranoïaque, au fond ; mais ça t’arrive, parfois, de ne pas t’y tenir. Justement, pour ne pas être prévisible. Ton itinéraire ne l’est pas. Mais on n’est jamais trop prudent, pas vrai ?

Tu perçois au loin le cocon dans lequel tu te loves lorsque la lumière n’est plus assez suffisante pour te permettre de mettre un pied dehors. T’es un survivant, et t’es pas inconscient. La vie, ici, entre l’Arizona et le Colorado, peut s’avérer exotique. Tu piétines tes terres, et tu te diriges vers l’entrée. Tu poses ta main contre le bois délabré, et tu pousses la porte dans un craquement sinistre. Tu ne bouges pas, ni même un peu pour pénétrer à l’intérieur, tandis que tes oreilles guettent le moindre bruit qui proviendrait de l’intérieur. Tu relâches le lapin mort sur le palier, tandis que ton autre main vient attraper le couteau à ta ceinture, et tu pousses complètement la porte de ta première main, désormais libérée de toute emprise. L’entrebâillement t’apparaît, et tu entres lentement. Plusieurs minutes s’écoulent, et tu fais le tour de la baraque. Rien. A chaque fois, c’était la même rengaine. Tu préférais être trop prudent que pas assez. Après tout, c’est ce qui t’a gardé en vie jusqu’ici. Tu retournes sur le palier, tu constates un instant la bête assassinée, qui t’attend toujours. Tu souffles du nez, et tu ranges ton couteau à ta ceinture. Tu te penches, et tu la récupères. La porte se referme alors à ton passage, une porte que tu as l’habitude de barricader une fois que tu es à l’intérieur, et tu t’approches de ce qui ressemble à un semblant de salon. Une cheminée trône à son coin. « Fuck. » Tu constates qu’il n’y a plus de bois. Tu dégages ton regard pour toiser une nouvelle fois le lapin. « Seems like you and I are going to do some exercise. » Tu hausses les épaules à ta propre remarque. « Well, mostly me. And you... You’re just going to wait. » Tu reprends ton parcours pour te diriger vers la cuisine, et étaler de tout son long l’animal sur l’un des plans de travail. « Don’t move. » Tu lui adresses quelques mots, comme s’il peut te répondre, comme s’il est encore vivant. Tu sais bien que non, tu n’es pas fou. Parler à tout comme à rien te permet juste d’apaiser ta solitude. Tu te diriges vers l’entrée, tu retires les barricades, et tu sors.

L’avantage, c’est que tu as encore du bois. Mais il faut que tu le découpes. Au moins, ça va te permettre de te défouler. De passer les nerfs sur quelque chose. Toi aussi, t’en as besoin, parfois. Tu restes humain. Même si ça te fait clairement chier. Tu attrapes une hache posée dans un coin du terrain, enterrée dans le sol, et tu la soulèves. Tu commences à placer quelques rondins, et tu t’adonnes à les démembrer. Au bout de nombreuses minutes, des craquements de branche te parviennent à nouveau aux oreilles. Sauf que ce n’est pas toi qui marches dessus. T’es entraîné, tes oreilles aussi. Il te faut peu de temps pour deviner, à la démarche, à la façon de marcher, à ce que tout ce que tu es capable d’entendre, qui s’approche dangereusement de toi. Le bruit des craquements se rapproche, et au bout de quelques secondes, il s’arrête. Tu ne cesses pas ton activité, et tu attends de voir les deux morceaux de bois s’écrouler contre le sol pour briser le silence. « Missed me, Agent Romanoff ? » Tu attrapes une autre hache, celle-ci plantée dans la terre. Tu attrapes le manche d’une main, tu tires d’un coup sec, et tu la lui tends. « You’re not here to kill me, are ya ? » Non. Si elle était là pour ça, elle l’aurait déjà fait. Tu rattrapes le manche de ta propre hache de tes deux mains, celle-ci toujours enfoncée dans le bois, et tu la détaches. Tu attrapes un autre rondin pour le placer devant toi, et tu le coupes en deux parties distinctes. T’en attrapes un deuxième, que tu lances dans les bras de la rouquine. Tu la considères comme ton égal, malgré votre hiérarchie. L’une des seules personnes en lesquelles tu peux avoir confiance, malgré ta régulière méfiance.