The way it was || ft. Clea Strange

the way it was

@Stephen V. Strange | Think for yourselves. It'll save you a lifetime of heartbreak.

✶  Clea n'était plus sûre de rien. Elle n'arrivait plus à trouver la motivation de se battre pour sauver la Dimension Noire alors qu'elle avait de nouveau échoué. Comment pouvait-elle aspirer à récupérer le trône qui lui appartenait avant alors qu'elle n'était pas capable de protéger correctement son peuple. On lui a reproché tant de foi d'avoir passé trop de temps dans les autres dimensions, notamment la dimension terrestre, de s'être amourachée d'un humain et d'avoir manqué à son devoir à cause de cette union stupide, comme ils le disaient si bien. La Faltine était restée stoïque face à ces reproches, sûre d'elle, sachant que tous les choix qu'elle avait fait jusque là étaient les bons, même ce mariage, cette union mystique qui semblait parfois la mener à sa perte. Après tout, c'était après avoir laissé tomber son amour pour Strange qu'elle avait mené sa première rébellion et avait récupéré le trône. Tout comme c'était après son union avec le Sorcier Suprême de la Dimension Terrestre qu'elle avait tout perdu. Tout semblait lié, tout sembler ramener à Stephen, comme s'il était à la fois cette force pour elle, tout comme s'il la tirait vers le bas sans le vouloir.

Ne sachant que penser de la situation, ne sachant pas où aller et tellement honteuse de ce nouvel échec, c'était à Asgardia que la sorcière s'était réfugiée. Elle avait besoin de temps, besoin de souffler. Après tout, le temps ne s'écoulait pas de la même manière entre les deux dimensions. Elle avait du temps devant elle, alors que dans la Dimension Noire, chaque secondes étaient comptées. Elle aurait préféré se réfugier à Asgard directement, mais son cœur l'avait guidée là où se trouvait cette amie, ce pilier qui lui permettrait de retrouver l'envie et la force de se battre. Asgardia, cet avant-poste du Royaume de ce vieil ami, Thor, qui se trouvait sur Terre et qui n'avait rien à envier à la véritable Asgard. Asgardia qui se retrouvait prise dans un conflit terrestre qui dépassait également Clea. Elle pensait pouvoir jouir des ressources de la Terre comme bon lui semblait, mais en réalité, elle avait dû se résoudre à faire profil bas. Si elle était revenue dans cette dimension, c'était pour demander de l'aide à ses quelques amis. Brunhilde, Thor, Wanda, tous ceux qui seraient à même de combler ce manque sans qu'elle ne se voit obligée de faire appel à son époux. C'était pour lui prouver qu'elle pouvait se débrouiller sans lui qu'elle avait décidé de retourner affronter sa famille sans qu'il n'intervienne, presque sans lui dire au revoir. Et pour ne pas admettre son échec, pour ne pas se montrer devant lui comme une incapable, elle avait fait en sorte qu'il ne puisse l'atteindre – si tant est qu'il essaye de la trouver.

Des jours, des semaines, puis des mois se sont écoulés depuis l'arrivée de Clea à Asgardia. Chaque jour ressemble à son voisin, les plans de rébellion de la Dimension Noire n'avancent que très peu. Tout ce qui est envisagé a – généralement – déjà été tenté. La Faltine essaie tant bien que mal de ne pas se mêler au conflit qui concerne la Terre. On tente de la convaincre d’apporter son aide, certains ne voulant pas comprendre sa neutralité. Elle ne peut pas intervenir et elle sait que son époux n’interviendrait pas non plus, à moins que le conflit n’évolue sur le plan mystique, alors elle restera neutre.


« You have to ask for help, Clea. You can’t risk everything just because of your pride. »

Elle se tourne légèrement vers la jeune femme qui l’accompagne dans sa rébellion, l’une des quelques Mhuruuks de la Dimension Noire qui l’ont suivie dans la dimension Terrestre. Le retour de la Faltine sur Terre n’a pas été vu d’un bon œil par tous les rebelles, mais certains ont compris son choix et l’on suivie. La plupart se sont éparpillés sur Terre pour éviter de concentrer leur présence au même endroit, se donnant le temps de revenir plus fort, de souffler.

« I know. I will. »

Elle se refusait à l’idée de faire appel à Stephen par fierté. Mais la fierté ne doit mettre en péril ceux qu’elle essaie de protéger. Si elle ne suffit pas à les sauver de Dormammu, alors elle devra s’entourer comme elle le peut. Faire appel à Wanda était sa première idée, mais elle semble avoir d’autres ennuis prioritaires. Elle décide alors d’annuler le sort qu’elle avait lancé pour se camoufler, pour empêcher Stephen de la rejoindre dès son retour sur Terre. Elle avait honte de son échec, et elle avait peur de le retrouver, ne sachant pas dans quel état elle le retrouverait après trois années.

Elle n’avait pas imaginé que si vite après avoir annulé le sort, il se manifesterait aussi rapidement. Elle l’avait espéré, mais elle pensait qu’il aurait été trop occupé par un quelconque problème mystique pour pouvoir se déplacer jusqu’à Asgardia. Elle avait bien trop de choses à lui dire et elle n’avait pas eu le temps de tout préparer, de réfléchir aux moindres détails. Elle ne savait même pas comment elle devait se comporter face à lui. Elle n’avait même pas eu le courage de lui dire au revoir en personne, elle ne lui avait pas laissé la chance de la retenir.

C’est debout face à la gigantesque fenêtre qui permet à sa chambre d’être inondée de lumière qu’elle attend, partagée entre joie et peur. Joie de retrouver celui qu’elle aime, peur de devoir crier à l’aide une énième fois depuis toutes ces années. Elle ne bouge pas, seule dans cette pièce trop grande pour elle, persuadée de ne pas mériter de tels honneurs de la part des Asgardiens qui l’ont généreusement accueillie malgré les problèmes qui les touchent. Puis elle sent la présence de son époux, son arrivée est loin de passer inaperçue, mais elle ne bronche pas, elle ne veut pas trahir ce qu’elle essaye de construire depuis toutes ces années, cette image de rebelle indépendante. Pourtant, elle ne trompe personne, elle le sait bien. Il s’approche petit à petit mais elle reste immobile, et ce n’est que lorsqu’il est finalement dans la même pièce qu’elle et que la Cape vient virevolter autour de la Faltine, qu’elle tourne légèrement la tête, un sourire timide aux lèvres. Elle n’a jamais su pourquoi la Cape l’appréciait toujours autant, peut-être était-ce parce que Stephen et Clea avaient ce lien si spécial. Elle n’a jamais été ainsi avec les autres conquêtes et autres disciples de Strange, chose qui a toujours rassuré la sorcière, dans un sens.

Elle frissonne lorsqu’elle entend cette voix qu’elle a tenté de ne pas oublier avec le temps. Elle se souvenait approximativement de son timbre de voix si particulier, mais le temps a le don de toujours tout effacer progressivement. Elle reste silencieuse un moment, ne se tournant pas complètement, pas encore. Il dit être rassuré avant de demander pour quelle raison elle voulait le voir, ou plutôt, pour quelle raison l’avait-elle autorisé à venir la voir. S’il avait voulu, il aurait pu venir plutôt, il est suffisamment puissant pour contourner ce genre de sort aussi simple, mais elle avait espéré qu’il respecte la volonté de la Faltine, et il ne l’avait pas déçue.

« There is something I wish to tell you, indeed. »

Répond-t-elle simplement. Elle se retourne finalement, pouvant constater de ses propres yeux que ce n’est pas une illusion, ni une projection astrale, qu’elle ne rêve pas. Il est là, devant elle, il est venu à elle à peine la restriction levée. Elle voudrait simplement sourire et lui sauter dans les bras, mais comment agir ainsi après tout ce temps. Ces retrouvailles sont étranges, dignes d’un couple comme le leur.

« There are so many things I’d wish to speak about, actually. I don’t know if I have the time or… or the courage. »

Elle s’avance vers lui délicatement, sans se presser mais surtout son regard plongé dans celui de son époux, un regard qui lui avait manqué, ces yeux qu’elle avait presque oubliés.

« I am glad you came. I didn’t know if you would after all this time. After I avoided you... »

Pleine de remords, elle baisse les yeux. Elle sait qu’elle n’aurait pas dû faire les choses ainsi. Si elle n’avait pas voulu tenter de prouver quoique ce soit à elle-même, peut-être qu’elle n’en serait pas ici aujourd’hui.

« You have all the right to be mad at me Stephen. »

Elle ne pourrait même pas lui en vouloir. C’est son droit, et il aurait raison. Elle ne regrette pas d’avoir décidé de reprendre les armes pour défendre la Dimension Noire, elle regrette les conditions dans lesquelles elle l’a fait, elle regrette d’être revenue et d’avoir tenu éloigné celui qu’elle aime tant et qui aurait pu la soutenir mieux que quiconque. La honte ne fait qu’accroître, mais il est trop tard pour changer les faits.

Ⓒslytbitch.

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✶  Elle ne saurait pas mettre de mot sur ce sentiment, sur ce qu’elle ressent alors que l’homme qu’elle aime se trouve dans la même pièce qu’elle. Difficile d’avoir l’air heureuse de voir cette personne que l’on a évité pendant tout ce temps. Elle s’en veut tellement d’avoir pris ces décisions à l’époque. Elle aurait pu passer encore une éternité à fuir, à se cacher, à avoir honte d’avoir tourné le dos à la seule personne qui compte vraiment dans sa vie. Elle se demande pourquoi, et surtout comment, elle a pu en venir à faire un tel choix. On ne peut même pas parler de jeunesse, de choix non réfléchi, car c’était bel et bien le contraire. La décision de Clea de quitter la dimension Terrestre sans réellement dire au revoir à son époux, sans qu’il ne puisse la retenir et en lui demandant de se tenir éloigné avait été mûrement réfléchie.

A présent, il lui faut faire face. Assumer les conséquences de ce choix stupide. Malgré le ton posé de Stephen, Clea n’est pas dupe, elle sait qu’il n’est pas ravi, elle sait qu’elle ne va pas s’en sortir comme ça, elle n’y compte pas. Il lui faut un courage monstre pour se retourner et lui faire face. On ne peut pas dire qu’elle a peur, ce n’est pas réellement comme cela qu’elle qualifierait ce qu’elle ressent, mais de la honte, une certaine tristesse, et une certaine haine envers sa propre personne. Elle réalise ô combien Stephen lui a manqué rien qu’en apercevant le bleu de ses yeux, en laissant sa peau vibrer au son de la voix du Sorcier Suprême. Et même s’il prétend qu’il n’aurait pas pu ne pas venir la retrouver, elle préfère préciser être heureuse de le savoir là. Il aurait pu avoir renoncé à Clea il y a bien longtemps, il aurait pu briser ce lien qui les unit, frustré ou insatisfait de ce choix égoïste qu’elle avait fait. Il aurait eu raison, elle n’aurait pu lui en vouloir.

Lorsque finalement les deux êtres se frôlent, lorsqu’ils viennent poser leurs fronts l’un contre l’autre, ce moment dura à la fois une éternité tout comme il fut trop court aux yeux de la Faltine. Il était là, ce n’était pas un rêve, ni une illusion, ni une projection astrale. Il était là. Les sentiments de la sorcière étaient mélangés, entre une joie intense et cette envie de s’effondrer, de craquer, de faire tomber ce mur érigé depuis si longtemps. Pourtant, elle se contente de ce simple geste jusqu’à ce qu’il décidé de briser le lien.

Elle ne lui apprend rien lorsqu’elle lui dit qu’il a le droit d’être en colère. Elle le dit pour admettre – à sa manière – ses torts. Ne dit-on pas qu’une faute avouée est à moitié pardonnée ? Elle avait beau avoir redouté cet instant, elle n’était pour autant pas réellement préparée à cette colère, à cette rancœur si intense. Cet instant de proximité, de douceur ne fut qu’une trêve, probablement la trêve la plus courte que l’Histoire des dimensions ait connue. Elle ne s’était pas attendue à ce qu’il l’accueille avec des fleurs, à ce qu’il lui ouvre les bras en fermant les yeux sur les erreurs de son épouse. Elle ne s’attendait à rien de tout cela, mais ça ne rendait pas la situation simple pour autant. Il dévoila alors ce qu’il avait sur le cœur, évoquant le mariage – leur mariage – et la valeur qu’il avait aux yeux de la Faltine. Tous ces mots transperçaient le coeur de Clea, un à un. Ils étaient d’autant plus douloureux parce qu’elle ne pouvait nier le fait que Stephen ait raison. Elle avait failli à son devoir d’épouse, elle avait trahi cette confiance entre eux. Elle se mord la lèvre inférieure, mais reste silencieuse. Elle ne baisse pas les yeux pour autant, acceptant les mots de son époux. Il demande alors pourquoi, la raison pour laquelle elle s’est comportée comme elle l’a fait. La raison de son départ, mais surtout, la raison de l’absence de nouvelles. Elle s’était rendue compte de cela, après un temps, et puis elle s’était enfoncée dans cette situation dont la sortie semblait impossible à trouver, comme un labyrinthe impossible, duquel les murs changeraient de position tout le temps et fermerait ses portes à la sorcière à chaque fois qu’elle aurait l’impression d’en voir le bout. Le ton monte, elle reste de marbre à l’extérieur et pourtant, au fond d’elle, c’est un champ de bataille. Cet air sûr d’elle, la tête haute à recevoir la colère de l’homme qu’elle aime, à encaisser son agressivité sans broncher, juste en écoutant, en acceptant. Viennent alors les questions dont Stephen espère les réponses, celles qu’elle lui doit après tout cela. Le silence reprend ses droits l’espace de quelques secondes, de nombreuses secondes, puis Clea inspire avant de finalement répondre à toutes ces questions.

« I made a bad decision three years ago. Going back to the Dark Dimension was not a wrong call, but I know I should have told you. So why did I go without a warning ? Because I was in a bad place, Stephen. I had everything, I had a throne, people loving me – including you. I felt like I was special. I felt like I was not just your apprentice, not just your lover or your wife, or even Dormammu’s niece. I was Clea, Queen of the Dark Dimension, savior of the mhurruks and others. And then I lost a lot, including my confidence. »

C’était quelque chose qu’elle n’avait jamais réellement confié à Stephen, ne sachant pas s’il pourrait comprendre ce qu’elle ressentait. Elle avait toujours essayé de trouver sa place, de trouver ce pourquoi elle était née, la vie qui était faite pour elle. Et si être aux côtés du Sorcier Suprême de cette dimension faisait évidemment partie de cette vie qui lui était destinée, avoir perdu le reste avait été très compliqué à vivre.

« This is no excuse. But I was not myself, I felt like I had to prove something. So when I heard about what my mother did, when I heard she broke her promise, this was for me an opportunity to prove I could do something by myself. I wanted to save them. »

Si elle avait pu réfléchir clairement, si elle avait pris le temps d’analyser la situation, elle aurait su d’emblée qu’elle faisait le mauvais choix. Mais ce n’était pas le cas, elle avait foncée tête baissée, motivée par cette adrénaline, par ce goût du pouvoir, cette envie de plus, de faire ses preuve.

« Have you never made a mistake and when you realize it, it is too late. It was too late when I realized that it was way over what I can do, when I realized it had been weeks since I last spoke to you. And everytime, every single time, I told myself that it was not the right time, that it was too late and I didn’t know how to justify my acts because I knew that I was wrong since the very beginning. »

Elle soupire, relâchant finalement ce qu’elle retenait depuis tout ce temps. Enfin elle parvenait à mettre des mots sur ses erreurs, sur ce qu’elle ressentait. Ça ne suffirait pas à être pardonnée, mais elle avait exposé les faits. Elle tente de se rapprocher de Stephen une nouvelle fois, sans pour autant franchir cette barrière physique, juste pour être proche de lui, espérant qu’il comprendrait ses raisons. Elle jeta un bref coup d’oeil par la fenêtre avant de faire demi-tour pour finir ses explications.

« I didn’t mean to come back in this dimension at first. I was about to join Brunhilde in Asgard, but she was not there, she was here, in Asgardia. I knew you would know I was here as soon as I came back and I was not ready to see you for I was not supposed to stay in Asgard that long. »

Elle était venue retrouver Brunhilde pour lui demander de l’aide, sans prévoir que la situation sur Terre retarderait ses plans.

« I turned to Brunhilde first because I didn’t know how to turn to you after all that happened. I was scared, Stephen, scared that you would not help me, that you would hate me. »

Elle pose son regard sur son alliance, puis sur celle que porte Strange. Malgré tout ce temps, ni l’un ni l’autre ne semble avoir été capable de briser ce lien, et pourtant les voilà dans cette situation délicate où l’un remet en cause la valeur du mariage aux yeux de l’autre. Portant alors sa main gauche sur son coeur, elle relève une nouvelle fois les yeux.

« I know I failed to be a proper wife, but this marriage means everything to me Stephen. There is no one else, the only reason of this distance, of everything, is me. »

Ⓒslytbitch.

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✶  Après avoir tout déballé, Clea se sentait à la fois légère et complètement angoissée. Elle avait dit ce qu'elle avait à dire, elle avait tâché de ne rien oublier, de ne pas mettre de filtre, de ne pas enjoliver les choses et d'être sincère avec son époux. Se cacher derrière ses mensonges et la culpabilité pendant près de trois ans avait créé ce poids de plus en plus lourd et difficile à porter. C'était comme si à présent, elle était aussi légère, soulagée, en quelque sorte. Pourtant, elle ne pouvait s'empêcher d'angoisser à l'idée que Stephen lui réponde. Si trois ans plus tôt, elle n'aurait pas douté qu'il se montre compréhensif, cette enchaînement de mensonge, ce silence interminable, et cette spirale infernale dans laquelle elle s'était enfermée d'elle-même avait créé cette sorte de paranoïa, cette peur de perdre celui qu'elle aime, cette peur que ses sentiments aient changé malgré ses mots, malgré ses reproches prouvant pourtant le contraire. Le sort était à présent jeté. Elle ne voyait pas que dire de plus, sans chercher à se justifier réellement, les faits étaient établis et elle avait finalement fait part de ce qu'elle avait sur le cœur depuis bien plus longtemps que son départ de la dimension terrestre.

Il lui avait semblé qu'une éternité s'était écoulée entre le moment où Stephen lui avait demandé des explications, et le moment où elle avait enfin terminé. Il ne l'avait pas interrompue un seul moment, pas réellement, seulement des murmures, des remarques à lui même que Clea n’avait pas laissé la perturber. Elle ne voulait pas s’interrompre dans sa lancée, sachant qu’elle ne parviendrait plus à dire tout ce qu’elle avait à dire. Un silence s’était installé, un silence qui sembla durer une éternité, encore une fois. Il commence alors à répondre à la Faltine, expliquant qu’il ne comprend pas. Alors qu’elle est pendue aux lèvres de son époux, écoutant ce qu’il a à répondre, bien décidée à être à l’écoute, quelqu’un frappe à la porte. Aussitôt, Clea maudit cette personne qui se permet d’interrompre cet instant. Elle aurait dû prendre le temps de demander à ce que personne n’entre dans ses appartement sous aucun prétexte. La Terre pourrait bien être sur le point d’exploser, que ce n’était pas du tout le moment. Elle n’eut pas le temps de réagir que Stephen l’avait fait à sa place, en colère sans l’ombre d’un doute. Elle préféra ne pas faire de remarque comme elle l’aurait peut-être fait en temps normal. Ce n’était pas le moment de lui tenir tête ou de le corriger sur son comportement.

Et enfin, il proposa d’aller ailleurs, loin. L’idée n’était pas mauvaise. Si un garde avait osé les interrompre, sachant pertinemment que le Dr Strange était dans les parages, c’est qu’il devait y avoir une bonne raison. Seulement, elle n’était pas en état de gérer tout cela dans le moment présent, et pour l’espace d’un moment, elle devait consacrer son temps à son époux, tout ce temps qu’elle lui avait volé pour le consacrer qu’à sa dimension à elle. Il la supplia presque, et elle répondit d’un simple signe de tête en guise d’approbation.


Elle avait suivi Stephen dans le silence le plus absolu, traversant le portail qu’il avait ouvert. Ce n’est qu’une fois arrivés à destination qu’elle réalisa à quel point la Terre pouvait être un endroit idyllique. Elle l’avait presque oublié, ayant passé ces trois dernières années à ne vivre que dans la violence et la guerre, dans la noirceur et la peur. Cet endroit choisi par son époux convenait plus que parfaitement pour une discussion apaisée, pour que rien ni personne ne vienne les interrompre. Clea se perdit un moment dans l’immensité du paysage, dans sa splendeur. Elle s’imaginait même y rester, tout laisser derrière elle, ses pouvoirs ses responsabilités pour s’évader dans ce jardin d’Eden.

« It’s wonderful. »

Elle ne se souvient pas de la dernière fois qu’elle a vu quelque chose d’aussi beau, d’aussi paisible. C’est comme si cet endroit dont elle ignore la location était hors du temps, loin de ces guerres, de ces affrontements, de ces rébellions et de ces maladies. Etait-elle bien vivante ? Si elle n’était pas en plein milieu de cette importante discussion avec Strange, elle pourrait presque se sentir complètement apaisée et sereine.

Cette courte trêve prit fin lorsque Stephen décida finalement de prendre la parole. Après avoir été interrompu en Asgardia, il pouvait être certain – ou presque – que rien ne viendrait l'interrompre cette fois-ci. Elle l'écouta attentivement, recevant chacun des mots prononcés. Elle  tenta de garder la tête haute, de ne laisser paraître aucune émotion parce qu'elle ne voulait pas craquer, pas maintenant. Pourtant, les mots de son époux touchaient une cordes sensibles, il visait juste et choisissait les mots qu'il fallait pour la rassurer. Il expliqua ce que Clea était à ses yeux, les raisons pour lesquelles il avait décelé son potentiel, évoquant finalement un certain pouvoir que, selon lui, Clea posséderait. Elle ne dit rien, elle ne coupe pas la parole, et pourtant à cet instant, elle a du mal à concevoir qu'elle puisse détenir un quelconque pouvoir. Elle n'avait pas imaginé que des mots emplis de bienveillance pour lui faire cet effet. Comme si elle relâchait une certaine pression, d'une part, mais comme si ces mots lui permettaient très doucement de retrouver une certaine confiance en elle. Et ce n'étaient pas simplement les mots, mais le fait qu'ils soient prononcés par l'homme qu'elle aime. Alors leur mariage, leur union, leur alliance prend tout son sens. Seule une personne aussi chère peut prononcer ses mots et avoir un tel impact sur l'interlocuteur.

Elle ne s'était pas attendue à de tels compliments, elle s'était préparée à ce qu'il soit simplement en colère, qu'il lui reproche sans cesse cette erreur qu'elle avait commise, ce gouffre dans lequel elle s'était perdue. Encore une fois, il avait raison, elle ne semblait pas avoir complètement compris le sens de leur union. Elle n'aurait pas du douter de l'amour que Stephen lui porte, et s'il y a bien une chose dont elle avait besoin, c'est d'être rassurée par celui qui lui fait de l'ombre, par celui à qui elle est constamment comparée. Plutôt que de le voir comme une menace, elle aurait dû continuer à le voir comme un allié et surtout comme son égal. Elle décide de ne pas contredire les mots de son époux, de ne pas exprimer le fait qu'elle ne se sent pas aussi puissante qu'il ne le prétend, choisissant de simplement accepter ce qu'il affirme. Elle se retient, mais au fond, elle voudrait simplement briser cette barrière imaginaire qui les sépare l'un de l'autre.

Elle ne dit toujours rien lorsqu'il reprend la parole, confirmant que la femme qu'elle était trois ans plus tôt n'était pas celle qu'il connaissait, pas celle qu'il aimait. Avec le recul, elle a pris conscience de ses actes qui étaient loin d'être habituels. Puis, il était trop tard lorsqu'elle s'en rendit compte, trop tard pour faire demi-tour, trop tard pour abandonner la bataille dans laquelle elle s'était lancée aveuglément, provoquée par son oncle, une fois de plus. Enfin, les compliments se changent en conseil, en mise en garde, clamant qu'à agir ainsi, elle pourrait devenir comme sa mère ou son oncle. Mais là, malgré tous les efforts fournis, Clea ne parvenait pas à s'accorder à ce qu'il disait.

But I lost.

Elle pensa bien fort sans pour autant s'exprimer à voix haute. La destinée de la Faltine était loin d'être aussi claire que Stephen le prétendait. Elle aussi avait pensé que sauver le peuple de Mhuruuk de son oncle était ce que la vie lui avait réservée, mais était-ce vraiment le cas ? Plus rien n'était sûr à présent. Les nuits de la sorcière étaient emplies de doutes, de réflexions, de remises en question. Si les paroles de son époux lui permettaient d'y voir légèrement plus clair, d'alléger son cœur et de lui insuffler un semblant de confiance en elle, elle était consciente du travail qui lui restait à fournir.

Arriva alors la conclusion des mots de Stephen, déclarant son amour et sa loyauté à sa façon, promettant à Clea que quoiqu'il advienne, quelle que soit leur relation future, il sera toujours là pour elle, pour l'aider. Elle ne parvient pas à retenir ces quelques larmes qui glissent alors le long de sa joue, parce que ce qu'il exprime est exactement ce qu'elle voulait entendre. Pourquoi avait-elle douté de sa loyauté ? Pourquoi avait-elle eu peur de son refus ? Elle se détestait presque pour cela.

Stephen tendit sa main vers celle de Clea, et après une seconde d'hésitation, elle se saisit de la main de son époux, la serrant comme si elle avait peur que tout cela n'ait été qu'une illusion, une très belle illusion. Elle tente un sourire doux et sincère, parce qu'elle est heureuse de le voir malgré cette distance qui les sépare, malgré ce malaise qui a encore tant de mal à se dissiper. Trois ans, sur une vie qui a pourtant déjà duré plusieurs milliers d'années, ça devrait être futile, mais trois ans loin de son âme sœur est bien plus dévastateur qu'on ne le pense.

Finalement, il revient sur les projets de la sorcière, sur le fait qu'elle ne comptait initialement pas rester en Asgardia.

« I was hoping it would be just a small break from the rebellion, but it takes longer than we expected. We're not ready, and we won't be until we can gather forces to help us. »

Demander de l'aide aux êtres mystiques de la dimension terrestre n'est pas une mince affaire. Ils sont déjà bien trop préoccupés par le sort de leur propre dimension pour venir risquer leur vie pour un conflit qui, dans l'absolu, ne les regarde pas. Pourtant Clea sait que Dormammu ne s'arrêtera pas à la dimension noire lorsqu'il se sera débarrassé d'elle. Mais elle ne veut pas parler stratégie, bataille et rébellion, pas maintenant. Elle marque un silence après ses derniers mots, puis s'approche de Stephen, brisant alors cette distance entre eux qu'ils se sont efforcés de garder, et elle vient se blottir contre lui, le serrant dans ses bras tout en posant sa tête contre la poitrine du sorcier. Elle resserre son étreinte, rassurée qu'il ne soit pas une illusion.

« I've missed you so much, Stephen. I feel awful. I wish I could take back all the mistakes I've made. I wish I could do things differently knowing all that you said to me. »

Ce n'est pas qu'elle ignorait l'attachement du sorcier à sa personne, mais il y a toujours un fossé entre ce que l'on prend pour acquis et ce qui l'est réellement. La relation entre elle et le chirurgien n'a pas toujours été simple, et n'a pas toujours été évidente. Il leur aura fallu de nombreuses années avant de finalement s'engager dans ce mariage qui les unit aujourd'hui. Et des disputes, les deux êtres mystiques en avaient connues, mais cette fois-ci, Clea n'avait pas la force de se battre, de se défendre sachant qu'elle était la principale fautive. Il lui faudrait du temps pour guérir cette blessure, pour retrouver cette relation qu'elle chérissait tant, mais elle ne voulait pas pour autant se priver de ce contact avec son époux. Même si elle avait été plus bavarde sur ce qu'elle avait fait durant trois ans, même si elle lui avait donné des nouvelles, il n'y avait rien de tel que la présence physique de la personne que l'on aime.

« I have so many things I'd like to ask you, but not now. Is it okay if we just take a break from everything while we're here, if we don't talk about problems in our own dimensions ? »

Elle desserre légèrement son étreinte pour voir son visage. Ce visage qu'elle commençait à oublier petit à petit avec le temps, ce dernier étant le pire ennemi qui puisse exister. Mais même le temps n'empêchera pas Clea de profiter de cet instant.

« Where are we ? This place is incredible, almost unreal. »

Ⓒslytbitch.

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✶  Elle avait fait son possible pour que ses justifications n’aient pas l’air de simple excuses, pour que Stephen comprenne ses motivations. Elle l’avait blessé, elle avait bafoué les principes mêmes du mariage pour des raisons égoïstes, et tout cela en vain. Si leur couple était, ne serait-ce qu’une fois moins solide qu’il ne l’est, Clea n’aurait eu aucune chance pour que Stephen lui pardonne. Et pourtant, leur union n’était pas le fruit du hasard. Au delà de l’amour, il y a ce lien tout particulier qui fait qu’ils pourraient bien se faire la guerre un siècle durant, leur couple tiendrait jusqu’au bout et finirait par les ramener à la raison.

Elle se sentait plus légère d’avoir tout dit à Stephen. Elle aurait dû le faire dès le début, elle n’aurait jamais dû lui cacher quoique ce soit, car ces secrets, ces non dits lui avaient pesé sur la conscience et avaient rendu d’autant plus difficile ce besoin de se révolter une nouvelle fois contre son oncle. Maintenant, elle sait qu’elle ne devrait plus rien cacher à celui qu’elle aime, car même si les mots peuvent blesser, il est bien plus dangereux de restreindre la vérité trop longtemps. Trop de non dits, ça commence à peser à un moment donner, et il est plus facile d’exploser, de se mettre en colère lorsque l’on retient autant de choses, à reprocher à l’autre des choses sans même lui en avoir parlé avant, dans le calme. Clea était consciente de ses erreurs sur les trois dernières années, et elle était bien résolue à ne plus jamais la reproduire.

Elle savait qu’elle n’échapperait pas éternellement à cette discussion, et maintenant qu’elle avait déballé tout ce qu’elle avait sur le cœur, maintenant qu’elle avait tenté d’expliquer les raisons pour lesquelles elle avait agi ainsi, elle voulait profiter de cet instant avec son époux, elle voulait arrêter le temps, tout mettre sur pause, oublier la rébellion, la présence de l’AIM sur Terre ou encore leur querelle, et elle voulait simplement profiter de lui, l’étreindre. Alors elle brise la glace, elle fait tomber ce mur qui les séparait depuis tout ce temps, et elle réalise alors à quel point sa simple présence pouvait être une source d’énergie incroyable. Et rien que de l’étreindre lui faisait réaliser encore plus la stupidité de son départ. Elle espérait que Stephen ne lui refuse pas cette envie de tout oublier un instant et au contraire, il semblait même n’attendre que cela. Un sourire se dessine sur les lèvres de la faltine.

Il expliqua alors où ils se trouvaient. Angel Falls, les chutes de l’Ange, au Venezuela. Elle n’a jamais été très douée en Géographie terrestre, mais au moins elle pouvait mettre un nom sur ce paradis sur Terre – littéralement. Elle était émerveillée comme une enfant. Ce n’est pas faute d’avoir des paysages magnifiques dans la Dimension Noire, par endroits. Sa dimension est un peu particulières, on peut y trouver tout et n’importe quoi, des choses qui n’ont souvent aucun sens pour la logique des terriens. Elle se souvient avoir été surprise la première fois qu’elle avait mis les pieds dans la dimension terrestre. La gravité fut la première chose étonnante, puis cet ordre, toute cette vie régie autour d’un seul astre : le Soleil. Tout a un ordre, tout est logique, tout est rationnel – ou tend à l’être. Elle avait dû apprendre à marcher et ne plus voler ou flotter comme elle l’avait toujours fait.

« The name of this place is appropriate. I’ll never stop being impressed by what Earth has to offer, even in a century. »

Mais la réponse de la sorcière de la Dimension Noire n’avait peu d’importance car rapidement Stephen vint l’embrasser, rompant définitivement cette distance qu’ils s’étaient tous deux imposé. Clea ne saurait décrire ses sentiments actuels autrement qu’en disant qu’elle est heureuse. Si l’on fait fit de tout le reste, oui, être dans les bras de son époux la rend heureuse et elle aimerait que la vie soit aussi simple que cela. Malgré sa motivation certaine à remettre de l’ordre dans la Dimension Noire, elle se dit parfois que tout serait plus simple sans ces responsabilités, sans ce besoin constant de vouloir faire le bien, de faire passer les autres avant elle. Malheureusement, elle ne peut arrêter le temps. Enfin, techniquement, elle le peut, mais elle sait que ça n’apporte jamais rien de bon de jouer avec la dimension du temps.

Stephen met fin au baiser pour se diriger vers le rebord de la falaise. Connaissant les lois physiques de cette dimension, si elle ignorait que son époux était un sorcier, elle aurait probablement eu réellement peur en le voyant s’approcher aussi dangereusement du bord, mais elle se contente d’un léger sursaut. Il évoque alors les nuages qui, effectivement, n’étaient pas là quelques minutes avant. Impossible de savoir ce qui se cache en dessous, mais cette mer de nuage donne à cet endroit un côté encore plus édénique, un paysage qui lui rappelait presque certains coins de sa propre dimension.

Stephen demande alors s’ils ont besoin de dragon pour voler, et alors qu’elle s’apprête à lui répondre, il saute dans le vide, disparaissant tout aussi rapidement dans la mer de nuages. Les yeux de Clea se sont écarquillés lorsqu’elle l’a vu sauté, non pas par peur qu’il se blesse, mais simplement parce que le geste est imprudent, à l’image de cet homme, après tout.

« Stephen… Three years away from him and he’s still this reckless man I knew. »

Elle lève les yeux au ciel sans parvenir à réprimer ce léger sourire aux lèvres, amusée. C’est parce qu’il est ainsi qu’elle est tombée amoureuse de lui. Ce caractère vient avec son lot de mauvaises surprises, mais elle a fait son choix il y a bien longtemps maintenant.

Elle se jeta à son tour dans le vide, usant de la magie pour ralentir la chute et profiter de la vue qui s’offrait à elle. Le choix de l’endroit était vraiment incroyable, même Asgardia n’avait pas été placée à un endroit aussi resplendissant. En arrivant à quelques dizaines de mètres du sol, elle dévie pour atterrir délicatement au bord de l’eau, un peu trop frileuse pour s’y aventurer.

« Stephen Vincent Strange. If I was human, I’d probably be dead by now, my heart stopping as you were diving into the void. »

Elle prend un air sérieux qu’elle ne parvient pas à conserver, se mettant à rire parce que cet aspect de Stephen lui avait manqué. Elle n’avait pas ri depuis si longtemps, même avec les autres rebelles, elle ne parvenait pas à être elle-même, à se laisser aller, bien trop préoccupée par ce combat qu’elle mène depuis si longtemps.
Elle s’approche du rebord de l’étendue d’eau, hésitante. Puis d’un geste simple se fraie un chemin au travers de l’eau de manière à ne pas être mouillée pour finalement rejoindre son époux qui, lui, n’avait pas hésité un instant à se jeter à l’eau.

« Look at you, you’re soaking wet. »

Elle sourit, avant de faire le dernier pas qui la sépare de Stephen pour venir l’embrasser de nouveau. Ils avaient tant à rattraper après toutes ces années passées loin l’un de l’autre.

« Do you remember when we decided to get married ? It was probably the less romantic proposal Earth has ever known, and I know what I’m saying, I’ve watched movies. But then, you took me through several dimensions for our honey moon and… It was the best time of my life. »

Elle encadre le visage de celui qu’elle aime à l’aide de ses mains, ne réalisant pas encore qu’elle l’avait finalement retrouvé, de peur qu’il ne s’agisse que d’une illusion, un piège de son oncle pour se débarrasser d’elle. Après tout, il pourrait aisément gagner en l’enfermant dans une boucle temporelle, en compagnie de Strange – ou de son illusion, vivant tout deux une vie de rêve sans se soucier du reste.

« I hope this is real. This moment. I was so stupid to leave you. Since then, I’m so scared that seeing you would be a trick, an illusion, a dream or a nightmare. Tell me this is real. »

Elle retient les quelques larmes qui tentent de glisser le long de ses joues. Elle ne sait pas comment elle le vivrait, si tout venait à disparaître en l’espace d’un instant.

Ⓒslytbitch.

the way it was

@Stephen V. Strange | Think for yourselves. It'll save you a lifetime of heartbreak.

✶  Le temps ne change pas les gens, il dévoile ce qu'ils sont déjà. Ces trois années passés éloignés l'un de l'autre auraient pu devenir une décennie, un siècle, ou plus encore que les choses seraient probablement restées les mêmes entre eux. Il est certain que la rancœur et l'incompréhension n'auraient été que plus grandes, mais les sentiments qu'éprouvent Clea à l'égard de Stephen Strange semblent être immuables. Elle ne veut même pas savoir ce qu'il faudrait pour que ce lien se brise. Il semblerait que peu importe les erreurs qu'ils font, ils se pardonnent tout in fine. Elle lui pardonnerait tout. C'est comme si le jour où ils avaient décidé de s'unir, elle avait accepté de tout lui pardonner, tout ce qui était à venir. Le punir, lui faire payer le prix de certaines trahisons, évidemment, il n'y échapperait pas, mais elle finirait toujours par lui accorder le pardon, parce que c'est la définition de l'amour pour la Faltine. Mais en l'occurrence, cette fois-ci, c'était elle qui avait imploré le pardon de son époux.

Ils mirent de côté toutes ces choses négatives pour profiter de cet instant. L'endroit était bien trop beau, bien trop idyllique pour ne pas en profiter, même si les méthodes de Stephen étaient parfois un peu particulières. Sauter dans le vide sans prévenir lui ressemblait bien, mais Clea devait s'y habituer de nouveau. Elle le suivit sans tarder, le retrouvant plus bas, complètement trempé après son saut de l'ange. Elle était amusée, appréciant chaque seconde de cet instant-là tout en prenant soin de le sermonner comme elle aimait bien le faire. C'est comme si vivre ensemble et s'aimer était une chose qui ne s'oublie pas, comme s'ils s'étaient quitté quelques heures. N'importe quelle personne qui passerait par là et les surprendrait ne pourrait deviner que ce couple a été séparé aussi longtemps.

Il marquait un point lorsqu'il rappelait que le suicide n'était pas quelque chose d'envisageable chez une personne telle que lui. Son ego était peut-être le plus grand rival de Clea, après tout. Elle s'approcha du sorcier tout écartant l'eau au passage pour ne pas se mouiller. Elle aurait cependant dû prévoir que Stephen ne la laisserait pas s'en sortir comme ça, l'éclaboussant légèrement.

« How dare you ?! »

Répondit-elle en riant légèrement. Il la menaça de la pousser dans l'eau, s'il était mauvais, précisa-t-il. Sourire en coin, elle ne put s'empêcher de rétorquer :

« If you were evil ? There is no if, you are evil, darling. »

Puis elle fit le dernier pas qui les séparait pour venir embrasser l'homme qu'elle aimait. Elle savait qu'elle l'avait dérouté, elle avait vu son regard, son sourire, elle le connaissait par cœur et elle savait qu'il avait tenté de mener la danse, d'être celui qui viendrait l'embrasser, mais elle l'avait fait avant lui, elle n'avait pu s'en empêcher. Un baiser ne peut suffire à rattraper le temps perdu, mais chaque instant, chaque silence est une excuse pour renouer ce lien. Elle aurait pu se contenter d'un silence et d'un baiser, elle aurait pu se contenter de tenir le visage de son bien aimé entre ses mains, de plonger son regard dans les yeux gris du chirurgien, mais elle ne put s'empêcher d'évoquer des souvenirs qui refaisaient surface. Leur mariage est loin d'avoir été le mariage dont toute jeune femme rêve, il n'y avait rien de romantique dans la demande et dans la manière dont ils se sont unis. C'était à se demander alors si ce mariage avait une réelle valeur, à l'époque. Mais leur lune de miel, ô comment oublier ces moments qui furent les meilleurs moments de la vie de la Faltine. Elle avait pourtant vécu une vie bien plus longue que celle de son époux, pourtant rien n'avait égalé ce sentiment. Il répondit que c'était un sentiment partagé et elle ne pouvait douter de sa sincérité. Elle reconnaissait chacune de ses intonations, accentuant ses paroles ou parfois, les trahissant.

Clea était alors partagée entre ce sentiment de bien être, de bonheur, rassurée par l'amour que lui porte son époux, rassurée de le retrouver, et pourtant déchirée par cette impression que tout n'est qu'illusion. Tout semble si beau, si parfait qu'elle ne sait plus distinguer le faux du vrai. Cela faisait trois ans qu'elle était à cran, qu'elle restait sur ses gardes, en guerre contre son oncle, et même contre sa mère – une nouvelle fois. Elle les savait capable de tout, et surtout du pire. Elle finit par admettre ce qui pèse sur son cœur, cette crainte qui la ronge de l'intérieur. Elle ne parvient pas à garder tout cela pour elle, malgré cette envie de ne rien gâcher. C'était pourtant elle qui avait demandé à Stephen de mettre tout le reste de côté. Seulement, la crainte était trop grande pour ne pas être évoquée. Il trouva alors les mots justes pour la rassurer, pour faire disparaître cette culpabilité qui la rongeait tout autant que cette crainte. Elle essaya alors de se concentrer sur le présent, uniquement sur le présent, faisant fi du passé qui n'apportait rien de bon dans cet instant qui leur était réservé. Elle laissa traîner son regard autour d'eux, s'imprégnant de ce qui l'avait apaisée à leur arrivée. La beauté de l'endroit, le calme qui les entoure, elle ferme les yeux un court moment pour se concentrer sur les caresses de son homme, ces gestes doux sur son visage. Et lorsqu'elle ouvrit les yeux de nouveau, il était toujours là, lui jurant que tout était réel. Elle sourit, sans un mot, juste un sourire et elle plongea une nouvelle fois son regard dans celui de son époux, ne parvenant pas à trouver les mots qu'elle voulait prononcer, elle se contenta de le remercier avec les yeux. Puis de nouveau, ils s'embrassèrent, un baiser plus long mais bien plus doux. C'était un moment agréable, confortable que Clea aurait aimé faire perdurer, renfermant le corps de Stephen entre ses bras, et resserrant son étreinte pour qu'il ne puisse disparaître. Yes, it is indeed a beautiful dream.

En l'espace de quelques secondes, ils se retrouvèrent au Sanctum, allongés dans cet alcôve où ils avaient passé plus de temps que de raison dans le passé. Ce lit lui avait terriblement manqué, bien qu'elle se soit plaint de son confort plus d'une fois. A cet instant-là, il était bien plus confortable que dans ses souvenirs. Stephen lui rappela alors à quel point il avait été en colère contre elle et qu'il n'avait pas réussi à le rester plus d'une demi heure après leurs retrouvailles. Puis il lui rappela qu'il l'aimait. Les larmes qu'elle retenait jusque là se mirent à couler finalement.

« I love you too, Strange. More than I should. »

La nuit sembla durer éternellement, emprisonnée dans les bras de son époux, réapprenant à le connaître, à retrouver cette complicité presque oubliée. Finalement, cette nuit-là était la preuve que tout était bien réel, car personne n'aurait pu créer une illusion aussi sublime, ce moment intime étant la seule chose qui les raccrochait l'un à l'autre, qui les enfermait dans ce cocon rien qu'à eux. Leur moment. Leur nuit. Si seulement tout cela avait pu durer une éternité sans jamais les ramener à la réalité.

Toujours au creux des draps de ce lit, blottie contre Stephen, son bras caressant doucement son torse dénudé, elle lâche un soupire alors que les premiers rayons du soleil vienne effleurer son visage.

« Why can't we just live a quiet life, just the two of us ? It is always when you're angry with me, or I with you that we end up like this. »

Ils ne sont pas deux êtres ordinaires, et c'est bien pour cette raison qu'ils se sont trouvés et aimés. Être extraordinaire et avoir autant de responsabilités a un prix, incluant de devoir sacrifier des choses aussi banales qu'une vie de couple stable et tranquille. Elle sait que ce n'est pas la vie qui lui conviendrait ni à elle, ni à Stephen, mais elle se surprend parfois, dans ces moments vulnérables, dans ces moments de bonheur, à rêver d'une vie simple, loin de tout, une vie simple à deux. Un joli rêve. Une utopie.

« What now, my love, now that I'm back ? »

Ils avaient mis de côté la discussion du présent, de la dimension Terrestre, de ce qui l'avait occupé durant tout ce temps. Elle lui avait fait part de ses trois années en quelques mois, elle lui avait expliqué les raisons de son départ, mais se retrouver ne signifiait pas que tout allait redevenir normal – normal n'étant de toute manière pas dans leur vocabulaire.

Ⓒslytbitch.